Il ne chante pas comme Elsa, ne règne pas comme Simba, ni ne navigue comme Vaiana. Et pourtant, Stitch, le petit monstre bleu de “Lilo & Stitch”, est devenu un pilier discret mais redoutablement rentable de l’empire Disney.
Vingt ans après la première apparition de “Lilo & Stitch” au cinéma, ce personnage hybride, entre batracien turbulent et peluche rebelle, s’impose aujourd’hui comme l’une des figures les plus vendues du catalogue Disney. Son secret ? Un look mémorable, une personnalité décalée et une capacité rare à traverser les générations.
Dans une maison de Wake Forest, en Caroline du Nord, Elle Bauerlein, 8 ans, pense à Stitch “au moins dix heures par jour.” Elle l’emporte partout : sur sa taie d’oreiller, ses chaussures, son sac à dos… Même sa poupée American Girl porte une grenouillère Stitch et s’appelle désormais simplement “S”. Elle préfère Moana comme princesse Disney, mais uniquement parce que la plage lui rappelle Hawaii, l’univers de Stitch.
L’obsession d’Elle est loin d’être isolée. Stitch envahit les rayons de toutes les enseignes, de PetSmart à Primark, en passant par Yoplait, Five Below, et même Graceland avec une collection d’Elvis-Stitch. Certains TikTokers consacrent leurs comptes entiers à chasser les dernières nouveautés centrées sur le personnage. Cette visibilité est telle que Disney a inclus “Lilo & Stitch” parmi ses neuf licences vedettes dans ses rapports financiers 2023 et 2024, aux côtés de Mickey, Star Wars et les princesses.
Un phénomène intergénérationnel et sans frontière
Stitch fascine car il ne rentre dans aucune case conventionnelle. Ni homme ni femme, ni adulte ni enfant, ni animal ni humain : il séduit par sa singularité. Selon Richard North, PDG de Wow! Stuff, plus de 40 % des ventes du jouet électronique “Stitch Puppetronic” concernent des personnes âgées de 13 ans et plus. Chez les enfants, les achats sont répartis équitablement entre filles et garçons. Chez les adultes, les femmes sont davantage représentées.
La naissance d’une icône improbable
Tout a commencé dans les années 1980, lorsque Chris Sanders esquisse un monstre orphelin pour un projet de livre. Repris par Disney dans les années 1990, le personnage devient le Stitch qu’on connaît. La seule grande modification ? Le passage du vert au bleu, sur suggestion du département peinture pour qu’il ressemble davantage à un chien… ce qui aide certains personnages du film à justifier sa présence.
Sanders décrit Stitch comme un marginal : trop chaotique pour les héros, trop gentil pour les méchants. “Si Mickey, Donald et Goofy faisaient une fête de Noël, ils n’inviteraient pas Stitch. Mais les méchants ne l’inviteraient pas non plus”, résume-t-il. C’est cette zone grise entre bien et mal qui lui donne une identité si particulière. Il se permet des transgressions ludiques que Mickey n’oserait jamais : comme taguer le château de Cendrillon ou écraser un sabre laser sur une affiche.
Sur TikTok et Instagram, Ohana Trav met en scène sa collection Stitch dans une pièce dédiée de sa maison en Floride. Il en possède plus de 1 000 pièces. Il a vu la montée en puissance du personnage dès 2021, avec la collection “Stitch Crashes Disney” où le personnage se fondait dans d’autres univers, de “Peter Pan” à “Pinocchio”. Suivront une gamme estivale et des éditions thématiques avec des snacks de parc.

Où est passée Lilo ?
Paradoxalement, la petite fille hawaïenne du titre, Lilo, est quasi absente des rayons. Peu de produits la représentent, ni sa sœur Nani, ni les autres personnages humains. En revanche, Angel, version rose et féminine de Stitch apparue dans la série, bénéficie d’un vrai coup de projecteur. Pourtant, pour Josi Cruz, créatrice du compte @mainstreetorlando, les enfants s’identifient à Lilo et voient en Stitch le compagnon fidèle qui la protège malgré tout.
Alors que le remake live-action de “Lilo & Stitch” arrive en salles, les attentes sont énormes. Les premiers chiffres annoncent un lancement à 120 millions de dollars. La machine marketing tourne à plein régime. Et Stitch, désormais en CGI, semble prêt à conquérir une nouvelle génération. Mais pour Elle, la petite fan de Wake Forest, la tendance pourrait déjà basculer. “Cette année, tout le monde préfère Hello Kitty.” Rien n’est éternel… sauf peut-être un alien en short hawaïen.
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